« C’est l’Évangile et sa prédication qui ont le plus grand impact politique et social », dit Martyn Lloyd-Jones dans une entrevue en 1968.
Lloyd-Jones souligne ici une priorité évangélique. L’Évangile précède la politique, le changement social, et toute autre chose. L’Évangile est la puissance de Dieu pour le salut (Rom 1:16), et tout le reste suit. Ceci ne signifie pas, toutefois, une retraite piétiste de la société. C’est tout le contraire.
L’Évangile en premier
Lloyd-Jones a expliqué: « Je crois que la fonction de l’église est de [exercer une influence politique et sociale] de manière indirecte. Ce n’est pas l’affaire du prédicateur de traiter les questions sociales et politiques à partir de la chaire. » Au lieu de cela, les prédicateurs équipent les gens à produire un changement dans le monde. La prédication de l’évangile précède le changement dans la société. « Le danger est d’être matérialiste dans son point de vue. »
Il continue: « Quand tu édifies un homme spirituellement et tu fais de lui un vrai chrétien, alors il développe une conscience sociale. Tandis que ces autres hommes qui sont constamment en train de prêcher sur la politique et les conditions sociales… l’effet principal qu’ils ont est de faire fuir leurs congrégations… En d’autres mots, ils n’ont aucun impact du tout. Le résultat principal d’un homme qui prêche la politique, c’est qu’il gagne de la notoriété, mais il n’a aucun effet sur la situation. »
« Mon meilleur plan pour faire [des conditions sociales-politiques] est de produire des chrétiens en grand nombre. Et ensuite les politiques porteront attention. Ils n’écoutent pas ce que le prédicateur dit sur les questions politiques et sociales. »
Lloyd-Jones semble être en train de répondre aux prédicateurs qui parlent principalement du changement social et des conditions politiques. Il fait un argument de soulignement, non pas un argument de battre en retraite. Notez aussi qu’il parle directement aux prédicateurs, non pas aux chrétiens individuels.
Ensuite le changement social
Son point dans tout cela est un point de priorité et d’ordre, non pas de créer des choix « un ou l’autre ». Les politiciens ne s’intéressent pas (généralement) à ce que dit un prédicateur. Les chrétiens s’y intéressent. Quand un homme ou une femme reçoit la grâce du salut, ils changent complètement. Ils aiment faire le bien. Ils accomplissent la loi de l’amour. Ils rendent chaque endroit meilleur en le quittant que lorsqu’ils y sont arrivés.
Ailleurs, il dit, « C’est l’affaire des chrétiens individuels de faire leur part dans la société. » Il explique que les chrétiens ont besoin de participer dans la société en restreignant le péché et en contribuant ainsi au bien-être des gens dans cette vie.
Lloyd-Jones argumente dans son entrevue de 1968 que, en réponse à la proclamation de l’Évangile, les chrétiens dans l’histoire ont répondu en créant des hôpitaux, en contribuant à l’éducation, et en fondant des syndicats de travailleurs. En d’autres mots, Lloyd-Jones ne semble pas être en train de dire qu’il n’équipe pas les gens pour impacter le monde.
Il dit plutôt que l’Évangile change les cœurs des gens pour qu’ils puissent avoir un bon impact sur le monde autour d’eux. Et quand un pays est rempli de chrétiens qui pratiquent l’amour et des bonnes œuvres à cause de leur foi en Christ, alors les politiciens y portent attention.
En contraste, si l’on se concentre principalement sur le changement social ou sur l’engagement culturel, cela signifie qu’on devient une proie au point de vue matérialiste. Toutefois la réponse évangélique a été: l’Évangile d’abord. Ensuite, les cœurs changés changent le monde.
Non pas un ou l’autre
Lloyd-Jones ne prône pas le choix entre prêcher l’Évangile ou le changement social. Son argument est qu’en prêchant l’Évangile, les chrétiens deviendront le genre de personnes qui peuvent changer la culture et qui le feront. Les prédicateurs équipent les gens à accomplir la loi de l’amour: construire des hôpitaux, organiser des œuvres charitables, et ainsi de suite. Il s’agit de l’ordre des affaires, non pas une question d’une chose ou de l’autre.
Même si nous faisons objections à certaines parties de son argument, nous devrions toutefois porter attention à l’importance d’ordonner nos priorités: l’Évangile d’abord, ensuite le changement culturel. L’Évangile est pour toute la vie. Ainsi, le fait de prêcher l’Évangile d’abord ne réduit pas l’effet de la proclamation de l’Évangile. Cela pourvoit plutôt la plus grande puissance et la plus grande étendue d’influence. Nous prêchons Christ et Christ crucifié (1 Cor 2:2), et ensuite nous guidons les cœurs transformés à pratiquer l’amour et les bonnes œuvres (Héb 10:24).
Certains parmi nous sommes nés dans un Canada qui nous semblait chrétien. Ce n’est plus le cas. En réponse, nous pouvons soit faire du recul dans notre influence sociale et politique, ou nous pouvons faire l’œuvre de prêcher et proclamer l’évangile. Ce dernier choix, comme l’indique Lloyd-Jones, promet non seulement de changer des cœurs, mais aussi de former des chrétiens qui contribuent à la société. Le premier signifie que nous n’aurons peut-être « aucun impact du tout ».
Cet article a été initialement publié sur The Gospel Coalition Canada. La traduction est publiée ici avec permission.
Wyatt Graham (PhD., Southern Baptist Theology Seminary) est le directeur général de TGC Canada. Vous pouvez le suivre sur Twitter à @wagraham.