L’un des bons dons que Dieu a accordés aux êtres humains est celui de la mémoire et de la capacité à se souvenir du passé. Se souvenir de notre propre passé est vital pour savoir qui nous sommes et connaître le sentiment d’avoir une identité personnelle. Nous savons tous comment les désordres et les maladies qui ravagent la mémoire d’une personne détruisent aussi sa capacité à fonctionner de manière significative dans le présent.
Il en va de même pour les communautés; la société en général. Lorsqu’une communauté ou un peuple oublie son passé et d’où il ou elle vient, chacun est complètement désorienté et, finalement, incapable d’avancer vers l’avenir. Bien sûr, comme tout bon cadeau dans ce monde déchu, nous pouvons abuser de notre mémoire. Elle peut lier une personne ou une communauté au passé; alors un regret désespéré s’installe ainsi qu’une amertume impitoyable ou même une haine vengeresse.
Je crois qu’il est vrai que la connaissance du passé est vitale pour une vie significative dans le présent et le futur. Les évangéliques occidentaux font face à un avenir très incertain, car nous vivons à une époque où la connaissance de notre passé en tant que chrétiens évangéliques est considérablement faible. Qui étaient nos ancêtres et que croyaient-ils ? Quelle était leur relation avec Dieu et comment cela a-t-il façonné les églises qu’ils ont fondées ? Églises dont nous avons hérité.
Cet oubli de notre passé évangélique n’est, en réalité, qu’une espèce de mondanité.
Beaucoup trop d’évangéliques occidentaux manquent de connaissances et ne s’en soucient même pas. Comme l’a avoué Adaline Bowman, l’héroïne du film fantastique L’âge d’Adaline (2015) : « Je crois que je ne comprendrai jamais pourquoi si peu de gens se soucient de l’histoire. »
À cet égard, les évangéliques ne se distinguent pas de la culture occidentale, qui est passionnément amoureuse du présent, anticipe avidement l’avenir et se désintéresse absolument du passé; ou qui, si elle lui manifeste un quelconque intérêt, s’en sert comme un moyen de divertissement afin de s’évader. Cet oubli de notre passé évangélique n’est, en réalité, qu’une espèce de mondanité.
Le souvenir est d’une importance vitale.
Les Écritures, en revanche, accorde une grande importance au souvenir :
- Deutéronome 4.9 : « Souviens-toi de ce que l’Éternel, ton Dieu, fit à Miriam pendant la route, lors de votre sortie d’Égypte. »
- 1 Chroniques 16.2 – Psaumes 105.5 : « Souvenez-vous des prodiges qu’il a faits, De ses miracles et des jugements de sa bouche »
- Luc 17.32 : « Souvenez-vous de la femme de Lot. »
- Hébreux 13.7 : « Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu; considérez quelle a été la fin de leur vie, et imitez leur foi. »
Questions importantes:
Voilà un peu plus de 500 ans que Martin Luther a fait connaître ce que nous appelons la Réforme, en clouant les 95 thèses sur la porte de l’église de Wittenberg, en Allemagne, la veille de la Toussaint (31 octobre). Ainsi, en cette année de notre Seigneur 2021, prenons un moment pour nous souvenir de ce mouvement de réveil et de réforme.
Nous le faisons parce la Réforme a donné naissance à la multitude d’églises évangéliques qui existent aujourd’hui. Si les événements de ces années révolutionnaires n’avaient pas eu lieu, les choses seraient bien différentes aujourd’hui. Nous nous souvenons de cette ère non seulement pour avoir une meilleure idée d’où nous venons, mais aussi parce que les personnes y sont issues peuvent nous apporter sagesse et direction pour le présent.
De manière concise, la Réforme a été nécessaire parce que les gens du Moyen Âge avaient oublié les réponses à quatre questions très importantes :
- Qu’est-ce qui sauve une personne du jugement et de l’enfer ?
- Qui nous sauve du jugement et de l’enfer ?
- Comment pouvons-nous connaître les réponses à ces deux questions ?
- Suivant ces réponses, comment devrions-nous adorer ?
La Réforme n’était pas seulement un rétablissement de ces vérités fondamentales de l’Évangile et de la façon dont nous devons répondre à Dieu à la lumière de celles-ci, mais elle a également conduit au rétablissement de perspectives bibliques dans une foule d’autres domaines. Par exemple : le mariage et la famille, ainsi que les relations entre l’Église et l’État.
Réveil à Heidelberg
La Réforme a également été une période de réveil. Aujourd’hui, certains dissocient à tort le réveil de la réforme. En réalité, ce sont les deux faces d’une même pièce. On ne peut pas avoir la présence du Saint-Esprit qui réforme l’Église sans qu’il insuffle une vie nouvelle aux hommes, aux femmes et aux institutions. On ne peut pas non plus avoir l’Esprit qui ravive le peuple de Dieu sans lui rappeler des vérités oubliées ou négligées.
C’est ce qui ressort clairement d’un événement qui s’est produit en avril 1518, quelques mois après que Martin Luther eut publié ses 95 thèses. Luther avait reçu l’ordre de rendre compte de ces dernières à divers représentants du pape à Heidelberg, dans le Palatinat (territoire désigné), à environ 560 kilomètres de Wittenberg. Se joignirent à lui quelques centaines de moines de son ordre monastique, les Augustins.
Luther plaida sa cause en 28 thèses, dont le point culminant fut la thèse 25 : « Ce n’est pas celui qui fait beaucoup d’œuvres qui est juste, mais celui qui, sans les œuvres, croit beaucoup en Christ », une déclaration classique au cœur de la doctrine de la Réforme. Mais les choses ne se déroulèrent pas comme l’espéraient les représentants du pape, soit réduire Luther au silence. Au lieu de cela, la quasi-totalité du contingent allemand de son ordre monastique, les Augustins, se rallia à ses idées !
Comme Jeremy Jackson l’a souligné avec raison dans son histoire de l’Église, il n’y aurait pas eu de Réforme si elle n’avait pas été accompagnée par l’œuvre régénératrice et transformatrice de l’Esprit. L’impact du discours de Luther lors de la Dispute de Heidelberg est une formidable illustration de cette vérité.
Cet article a été initialement publié sur The Gospel Coalition Canada. La traduction est publiée ici avec permission.
Né en Angleterre de parents irlandais et kurdes, le Michael A. G. Haykin est professeur d'histoire de l'Église au Southern Baptist Theological Seminary, à Louisville, dans le Kentucky, et directeur du Andrew Fuller Center for Baptist Studies, qui est basé sur le campus du Southern mais qui a également un bureau en Ontario. Le Dr Haykin est l'auteur d'un certain nombre de livres traitant d'études patristiques et baptistes et est également le rédacteur en chef d'une édition en 16 volumes des œuvres d'Andrew Fuller (Walter de Gruyter). Lui et son épouse Alison habitent à Dundas, en Ontario, et sont membres de la West Highland Baptist Church, à Hamilton, en Ontario. Ils ont deux enfants adultes, Victoria et Nigel.