Pouvons-nous savoir que nous sommes sauvés ?

R. C. Sproul, Choisis par Dieu, trad. Marie-Andrée Gagnon, Éditions Impact, 2021, p. 153-155, 156-158.

Le ministère d’Évangélisation Explosive axe sa présentation de l’Évangile sur deux questions primordiales. La première : « En êtes-vous venu dans votre vie spirituelle à savoir avec certitude qu’à votre mort vous irez au ciel ? » Des personnes ayant l’habitude d’évangéliser disent que la vaste majorité des gens répondent à cette question par la négative. Pour la plupart des gens, leur futur salut n’est pas une chose sûre. Un grand nombre, sinon la plupart, entretiennent de sérieux doutes quant à savoir si une telle certitude est même possible.

Lorsque j’étais au séminaire, on a soumis ma classe à un sondage. De ce groupe particulier de séminaristes, environ 90 p. cent ont dit ne pas avoir la certitude de leur salut. Cette question a suscité la colère de nombreux étudiants, du fait qu’ils y voyaient un genre de présomption implicite. Certaines personnes jugent arrogant le fait même de parler de l’assurance du salut.

Il se peut effectivement que d’affirmer être assuré de son salut soit un acte d’arrogance. Si notre assurance du salut repose sur une assurance personnelle, il s’agit bien d’un acte d’arrogance. Si nous sommes certains d’aller au ciel parce que nous estimons le mériter, nous faisons alors preuve d’une arrogance innommable.

Pour ce qui est de l’assurance du salut, il existe fondamentalement quatre types de personnes dans le monde. 1) Il y a les gens qui ne sont pas sauvés et qui le savent. 2) Il y a les gens qui sont sauvés sans le savoir. 3) Il y a les gens qui sont sauvés et qui le savent. 4) Il y a les gens qui ne sont pas sauvés et qui « savent » l’être.

Or, c’est le dernier groupe qui met du sable dans l’engrenage. Si des gens n’étant pas sauvés se « savent » sauvés, comment les gens qui sont sauvés peuvent-ils savoir qu’ils le sont réellement ?

Pour répondre à cette question, nous devons d’abord nous en poser une autre. Pourquoi certaines personnes ont-elles une fausse assurance de leur salut ? En fait, il est relativement facile d’y répondre. La fausse assurance provient essentiellement d’une mauvaise compréhension de ce que le salut requiert ou implique.

Supposons, par exemple, qu’une personne est universaliste. Elle croit que tout le monde est sauvé. Or, si cette prémisse est juste, le reste de sa déduction logique coule de source. Voici son raisonnement :

Tout le monde est sauvé.
Je suis quelqu’un.
Je suis donc sauvé.

L’universalisme est beaucoup plus répandu qu’un grand nombre de gens le croient. Lorsque mon fils avait cinq ans, je lui ai posé les deux questions d’Évangélisation Explosive. Il a répondu à la première par l’affirmative. Il était certain qu’à sa mort il irait au ciel. Je lui ai ensuite posé la seconde : « Si tu devais mourir ce soir et Dieu te demandait : « Pourquoi devrais-je te laisser entrer dans mon ciel ? », que lui répondrais-tu ? » Sans hésiter, mon fils m’a déclaré : « Parce que je suis mort ! »

À l’âge de cinq ans, mon fils avait clairement reçu le message selon lequel tous ceux qui meurent vont au ciel. Sa doctrine de la justification n’impliquait pas la justification par la seule foi. Il ne s’agissait pas même de la justification par les œuvres ni d’une combinaison de foi et d’œuvres. Sa doctrine était beaucoup plus simple ; il croyait à la justification par la mort. Il entretenait une fausse assurance de son salut.

Si l’universalisme est grandement répandu dans notre culture, il en va de même pour le concept de la justification par les œuvres. Selon un sondage effectué auprès de mille personnes à qui l’on a posé la même question que j’ai posée à mon fils, plus de 80 p. cent d’entre elles ont fourni une réponse impliquant un genre de « justice par les œuvres ». Elles répondaient des choses comme celles-ci : « Il y a trente ans que je vais à l’église » ; « Je n’ai jamais manqué une seule leçon de l’école du dimanche » ; « Je n’ai jamais causé de réel tort à qui que ce soit. »

Dans le cadre de mon expérience avec Évangélisation Explosive, j’ai appris clairement une chose : Le message de la justification par la seule foi n’a pas pénétré notre culture. Il y a énormément de gens qui font reposer leurs espoirs par rapport au ciel sur leurs propres bonnes œuvres. Ils sont tout à fait disposés à reconnaître qu’ils ne sont pas parfaits, mais ils présument être assez bons pour mériter le ciel. Ils ont fait de leur « mieux » et cela, présument-ils tragiquement, suffit à Dieu…

Même si nous admettions ce que nous n’admettrions jamais dans les faits, à savoir que les gens font de leur mieux, nous savons que même cela ne suffit pas. Pour qu’il nous laisse entrer au paradis, Dieu exige de nous la perfection. Soit que nous trouvions celle-ci en nous-mêmes, soit que nous la trouvions ailleurs, en quelqu’un d’autre. Si nous croyons pouvoir la trouver en nous-mêmes, nous nous leurrons et la vérité n’est pas en nous (voir 1 Jn 1.8).

Nous voyons donc qu’il est très facile d’entretenir une fausse assurance de notre salut. Mais si nous comprenons bien ce que le salut requiert, cela garantit-il que nous éviterons d’avoir une fausse assurance du salut ?

Aucunement. Même le diable sait ce que le salut requiert. Il sait qui est le Sauveur. Il comprend mieux que nous la partie intellectuelle du salut. Il ne met cependant pas sa confiance en Christ pour son salut. Il hait le Jésus qui est le Sauveur.

Nous pouvons avoir une bonne compréhension de ce qu’est le salut et nous leurrer quand même pour ce qui est de savoir si nous satisfaisons ou non aux exigences du salut. Il se peut que nous croyions avoir la foi alors que ce n’est pas le cas. Il se peut que nous croyions en Christ sans pour autant que ce Christ soit le Christ de la Bible. Il se peut que nous croyions aimer Dieu, mais que le Dieu que nous aimons soit une idole.

Aimons-nous un Dieu qui est souverain ? Aimons-nous un Dieu qui envoie des gens en enfer ? Aimons-nous un Dieu qui exige une obéissance absolue ? Aimons-nous un Christ qui dira à certains au jour dernier : « Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi » ? Je ne demande pas si nous aimons ce Dieu et ce Christ à la perfection ; je demande si nous aimons même ce Dieu et ce Christ.

James Montgomery Boice a raconté l’une de mes anecdotes préférées depuis toujours. Il a parlé d’un alpiniste qui avait perdu pied et qui risquait de mourir en faisant une chute de milliers de mètres. Paniqué, il s’était agrippé à un maigre arbuste poussant entre les rochers de la falaise. Il avait ainsi interrompu momentanément sa chute, mais l’arbuste était en train de se déraciner. L’alpiniste avait levé les yeux au ciel et s’était exclamé : « Y a-t-il quelqu’un là-haut qui pourrait m’aider ? » Une profonde voix de basse lui était alors parvenue du ciel : « Oui, je vais t’aider. Fais-moi confiance. Lâche l’arbuste. » Après avoir regardé le vide sous lui, l’alpiniste s’était écrié de nouveau : « Y a-t-il quelqu’un d’autre là-haut qui pourrait m’aider ? »

Il se peut que le Dieu en qui nous croyons soit « quelqu’un d’autre ». J’ai souvent parlé avec les travailleurs de Young Life, un ministère qui accomplit une mission exceptionnelle auprès des adolescents. Or, la force de Young Life constitue en même temps son plus grand danger. Young Life connaît un taux affolant d’adolescents qui professent leur foi et qui la répudient ultérieurement.

Young Life excelle à entrer en relation avec les adolescents. Ses ouvriers sont passés maîtres dans l’art de rendre l’Évangile attrayant. Le danger, cependant, c’est que Young Life est tellement attirant et cool que des jeunes risquent de se convertir à Young Life sans jamais entrer en relation avec le Christ de la Bible. Mon commentaire ne se veut en rien une critique de Young Life. Je ne suggère pas que nous rendions donc l’Évangile sans attrait. Nous le faisons déjà assez. Je ne fais que souligner ce que nous ne devons jamais oublier, à savoir que les gens peuvent agir envers nous, ou envers notre groupe, comme étant le substitut de Christ et risquer ainsi de nous faire acquérir une fausse assurance du salut.

D’un point de vue biblique, nous devons comprendre que cela reste encore non seulement possible que nous ayons une véritable assurance de notre salut, mais aussi qu’il est de notre devoir de rechercher cette assurance. Par ailleurs, si cette assurance est possible et si elle est exigée, il n’est pas arrogant de la rechercher. Il serait plutôt arrogant de ne pas la rechercher.

L’apôtre Pierre écrit ceci :

C’est pourquoi, frères, appliquez-vous d’autant plus à affermir votre vocation et votre élection ; car, en faisant cela, vous ne broncherez jamais. C’est ainsi, en effet, que l’entrée dans le royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ vous sera largement accordée. (2 Pi 1.10-11)

Nous voyons ici le mandat d’affermir notre élection. Cela requiert du zèle. Nous y voyons un intérêt pastoral. Pierre relie l’assurance au fait de ne jamais broncher. L’un des facteurs parmi les plus importants qui contribuent à la croissance spirituelle du chrétien, une croissance spirituelle constante, correspond à l’assurance du salut. Bon nombre de chrétiens se trouvent dans un état de salut dont ils n’ont pas l’assurance. Le manque d’assurance fait gravement entrave à la croissance spirituelle. La personne qui n’est pas certaine de son état de grâce expose son âme aux doutes et aux terreurs. Il manque à sa vie spirituelle une ancre. Son incertitude la fait marcher avec Christ d’un pas hésitant.

Il importe non seulement d’acquérir une véritable assurance, mais aussi que nous l’acquérions tôt dans la vie chrétienne. Elle constitue un élément clé de notre croissance en maturité. Les pasteurs doivent en être conscients et aider leurs brebis à la rechercher avec zèle.

Pour en savoir plus sur le livre, cliquez sur le lien suivant :

Choisis par Dieu

R. C. Sproul
Plus de publications

R. C. Sproul (1939-2017) était un ancien enseignant ordonné dans la Presbyterian Church in America et a eu une brillante carrière d'enseignant universitaire dans divers collèges et séminaires, y compris le Reformed Theological Seminary à Orlando et Jackson, Mississippi. Il était également le fondateur de Ligonier Ministries, un ministère international d'éducation chrétienne situé près d'Orlando, en Floride.

Published By: R. C. Sproul

R. C. Sproul (1939-2017) était un ancien enseignant ordonné dans la Presbyterian Church in America et a eu une brillante carrière d'enseignant universitaire dans divers collèges et séminaires, y compris le Reformed Theological Seminary à Orlando et Jackson, Mississippi. Il était également le fondateur de Ligonier Ministries, un ministère international d'éducation chrétienne situé près d'Orlando, en Floride.