Exode 3: Le nom de Dieu est sa présence pour sauver

Partie V de la Théologie du Pentateuque

Se représenter Dieu

Notre tendance est d’avoir une vision abstraite de Dieu, structurée autour de ses attributs incommunicables, comme l’omniscience, l’omniprésence et l’asexualité. Mais ce n’est pas principalement ainsi que Dieu se révèle à nous dans l’Écriture. Jean Calvin écrit: « Moïse nous rappelle alors les attributs de Dieu qui le montrent non pas tel qu’il est en lui-même, mais tel qu’il est envers nous. Ce genre de connaissance relève davantage de l’expérience vivante que de la spéculation vide. »

Dans le livre de l’Exode, plus clairement que dans toute autre partie de l’Ancien Testament, nous voyons l’interaction de la rédemption et de la révélation que nous trouvons dans toute l’Écriture, car c’est ici que Dieu révèle son nom. L’Éternel révèle son caractère dans la rédemption: il est le Dieu qui nous rachète par la relation et pour la relation.

Celui qui habite dans le buisson

Exode 3.1-6

1Moïse était devenu berger du troupeau de son beau-père Jéthro, le prêtre de Madian. Il conduisit le troupeau derrière le désert et vint à la montagne de Dieu, à Horeb. L’ange de l’Éternel lui apparut dans une flamme de feu, au milieu d’un buisson. Moïse regarda et vit que le buisson était tout en feu sans être consumé.Moïse dit: « Je veux faire un détour pour voir quelle est cette grande vision et pourquoi le buisson ne brûle pas. » L’Éternel vit qu’il faisait un détour pour regarder. Dieu l’appela du milieu du buisson en disant: « Moïse! Moïse! » Il répondit: « Me voici! » Dieu dit: « Ne t’approche pas d’ici, retire tes sandales, car l’endroit où tu te tiens est une terre sainte. » Il ajouta: « Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob. » Moïse se cacha le visage, car il avait peur de regarder Dieu.

Malgré le fait qu’elle soit devenue iconique et familière, la flamme de feu provenant du buisson est une image bizarre. Le feu est essentiel à la culture humaine – il apporte lumière et chaleur, il purifie et raffine – mais c’est un dévoreur, capable d’une destruction totale et impitoyable. Tout au long de l’Écriture, le feu est une métaphore puissante de la sainte présence de Dieu (Ex 24.17; Dt 4.24; Es 10.16-17).

Ailleurs dans l’Ancien Testament, les buissons d’épines et les arbustes décrivent une végétation nuisible ou peu utile (Jg 9.14-15; 2 Sa 23.6; Ps 58:9; Pr 15.19). Les arbustes brûlent trop vite pour être un bon combustible (Ec 7.6) et piquent ceux qui habitent à proximité (Ez 2.6; 28.24; Pr 26.9). Si le feu est un symbole pour Dieu, alors ce buisson représente Israël : épineux, ingérable, inadapté à sa fonction.

Cette théophanie est prophétique dans son symbolisme, permettant d’entrevoir ce qui va se passer entre Dieu et son peuple. Tout le reste du Pentateuque (et toute la Bible) peut être compris comme la lutte pour qu’une flamme brûle dans un buisson de ronces sans le détruire. Selon toute vraisemblance, la flamme devrait consumer le buisson en quelques instants, mais pour une raison quelconque, Dieu ordonne qu’elle ne le fasse pas et prévoit que cela n’arrive pas. C’est une image de la grâce.

Lorsque Dieu dit à Moïse d’enlever ses sandales parce que le sol est saint, c’est la première fois dans les Écritures qu’un lieu est qualifié de saint. Et il est saint parce que la présence de Dieu s’y trouve, et la présence de Dieu s’y trouve parce qu’il a vu et qu’il connaît l’affliction de son peuple (Ex 2.23-25; 3.7-10). Ce Dieu n’est pas d’abord un Dieu abstrait, défini par des attributs incommunicables, dépassionné, assis au-delà du temps et hors de l’espace. C’est le Dieu qui a appelé Abraham et a noué avec lui une relation coûteuse (Gn 22). Ce Dieu voit, connaît, se souvient de son peuple. Il habitera avec nous comme une flamme dans un buisson d’épines.

Dieu révèle son nom dans la rédemption

Dans les vv. 7-10, Dieu annonce à Moïse qu’il a entendu les cris des Israélites et qu’il s’apprête à les sauver en envoyant Moïse à Pharaon. Moïse trébuche sur cette annonce :

Exode 3.11-17

11Moïse dit à Dieu: Qui suis-je, moi, pour aller trouver le pharaon et pour faire sortir les Israélites d’Egypte? » 12 Dieu dit: « Je serai avec toi. Voici pour toi le signe que c’est moi qui t’envoie: quand tu auras fait sortir le peuple d’Egypte, vous servirez Dieu sur cette montagne. » 13 Moïse dit à Dieu: « J’irai donc trouver les Israélites et je leur dirai: ‘Le Dieu de vos ancêtres m’envoie vers vous.’ Mais s’ils me demandent quel est son nom, que leur répondrai-je? » 14 Dieu dit à Moïse: « Je suis celui qui suis. » Et il ajouta: « Voici ce que tu diras aux Israélites: ‘Je suis m’a envoyé vers vous.’ » 15 Dieu dit encore à Moïse: « Voici ce que tu diras aux Israélites: ‘L’Eternel, le Dieu de vos ancêtres, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob, m’envoie vers vous.’ Tel est mon nom pour toujours, tel est le nom sous lequel on fera appel à moi de génération en génération. 16 Va rassembler les anciens d’Israël et dis-leur: ‘L’Eternel, le Dieu de vos ancêtres, m’est apparu, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Il a dit: Je m’occupe de vous et de ce qu’on vous fait en Egypte. 17 J’ai dit: Je vous ferai monter de l’Egypte, où vous souffrez, dans le pays des Cananéens, des Hittites, des Amoréens, des Phéréziens, des Héviens et des Jébusiens, un pays où coulent le lait et le miel.’ 

Il est difficile de distinguer, dans les objections de Moïse, l’humilité nécessaire, le doute véritable et la simple peur. Dieu répond par une déclaration de sa présence pure. Mais Moïse va plus loin. S’il veut affronter Pharaon sur la base de la présence de ce Dieu, il doit en sonder les profondeurs.

Moïse demande essentiellement à Dieu de lui démontrer sa nature et son caractère, de lui révéler sa véritable nature (cf. Ex 33.18-19). Dans l’Ancien Testament, les noms ne servent pas seulement d’accessoires utiles pour désigner des personnes, mais sont en fait des descripteurs. Un nom définit quelqu’un et renseigne sur son caractère, sa fortune et ses traits caractéristiques (Gn 25.25-26; Ru 1.20; 1 Sa 25.25). De plus, celui qui donne le nom définit la personne et exerce son autorité et son pouvoir sur elle (Gn 2.20; 3.20; 17.5, 15-16; 32.28).

Le dialogue qui suit dans les vv. 13-15 est insondable. Les réponses de Dieu sont d’une simplicité trompeuse, d’une circularité qui désoriente et d’une profondeur merveilleuse. Ces paroles ont généré des bibliothèques de réflexions théologiques et pourtant elles restent insaisissables, inexplicables et définissent ce que Dieu est pour nous. Nous ne comprendrons jamais le nom de Dieu, mais nous pouvons toujours dire des choses vraies sur ce qu’il nous a révélé.

1. Dieu se nomme et se définit lui-même. Si celui qui nomme quelqu’un ou quelque chose exerce une autorité et un contrôle sur eux, l’autodéfinition de Dieu en tant que « Je suis qui je suis » est un exercice de liberté totale. L’accent mis sur l’être et la causalité par l’idée de nommer montre que ce dieu n’est pas simplement le dieu d’un peuple ou d’un lieu particulier, personne ne l’a nommé ou créé – IL EST. Il se définit lui-même.

2. Dieu se définit de manière relationnelle comme présent auprès de son peuple. Dans le contexte de l’histoire, la première et la plus fondamentale des choses que Dieu dit est « Je serai avec vous » (v. 12). Cette affirmation a déjà été visualisée dans le symbolisme du buisson ardent. Le nom de Dieu renvoie à l’idée de la présence de Dieu. Si vous lisez l’hébreu, des formes identiques du verbe sont utilisées à plusieurs reprises dans toutes ces déclarations. Cela crée un lien entre le nom personnel réel (JE SUIS) et les expressions de présence et de réconfort pour Moïse (JE SUIS avec toi). Lorsque Moïse est envoyé aux Israélites, il devient lui-même une expression tangible de la présence de Dieu. Enfin, l’accent mis sur la connexion du nom divin aux noms des patriarches crée un profond sentiment de présence dans la perpétuité et dans la continuité avec son peuple. Dieu dit : « Vous ne savez peut-être pas qui je suis, mais je ne vous ai jamais perdu de vue, j’ai toujours été là. C’est mon nom pour toujours. Je suis ici et je serai ici. »

3. La présence de Dieu avec son peuple accomplit la rédemption. Les versets 16-17 mettent le nom de Dieu en action. L’action de Dieu pour racheter son peuple est liée à l’exposition de son nom : (1) JE SUIS est le Dieu de leurs pères et il les voit. (2) JE SUIS agit maintenant sur une relation d’alliance faite avec leurs pères afin de les bénir. (3) JE SUIS affrontera Pharaon (représentant des pouvoirs d’oppression terrestres et divins) et accomplira des merveilles afin de délivrer son peuple. (4) Son peuple récoltera de grandes bénédictions grâce à son action en leur faveur. Quand tout cela arrivera, vous saurez que JE SUIS YAHWEH et vous saurez ce que cela signifie, à savoir que JE SUIS avec mon peuple pour le racheter (Ex 20.2).

YHWH révèle son caractère dans la rédemption : il est le Dieu qui nous rachète par la relation et pour la relation. Comme le dit Bruce Waltke, « Je suis qui je suis pour toi ». Le nom de Dieu, c’est sa présence pour sauver.

Nous continuerons à étudier le nom et le caractère de Dieu dans l’Exode la prochaine fois…

Seigneur, nous avons besoin de sentir ta présence. Alors que le monde semble conspirer et se déchaîner autour de nous, nous avons confiance que tu es derrière et avant toutes choses, que tu nous connais, que tu te souviens de nous et que tu agis pour nous sauver. Entoure-nous, ô Éternel, de la paix de ta présence afin que nous sachions que tu es avec nous.

Cet article a été initialement publié dans la série Splintered Light. La traduction est publiée ici avec permission.

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Alex Kirk est un partenaire ministériel de Training Leaders International, professeur invité d'Ancien Testament à la William Tennent School of Theology et doctorant en théologie et religion (Ancien Testament / Bible hébraïque) à l'Université de Durham. Il enseigne partout dans le monde et écrit un bulletin mensuel sur la vie, le ministère et les Écritures appelé SPLINTERED LIGHT. Alex et sa femme, Meghan, vivent dans le nord-est de l'Angleterre avec leurs trois filles.