Le dernier épisode régulier du balado de Mike Cosper, « L’ascension et la chute de Mars Hill », est sorti à la fin de l’année 2021, mais je dois avouer que je viens tout juste de l’écouter. Alors que je regarde l’église en 2023, je pense qu’il est important de reconnaître que ce n’est pas parce que la plupart d’entre nous avons cessé de faire état du balado que nous avons appris quoi que ce soit ou que nous avons fait les changements qui s’imposaient. Nous sommes toujours plus que capables de commettre ces mêmes erreurs catastrophiques en Australie. La plupart de nos églises sont beaucoup moins connues, mais le mal causé au peuple de Dieu n’en serait pas moins grave.
Voici quelques réflexions sur les leçons que nous devrions tirer de ces événements dramatiques survenus à Seattle il y a dix ans.
Attention aux chiffres
Parler de chiffres est important, mais risqué. L’une des observations récurrentes tout au long du contenu du balado est la préoccupation croissante pour le nombre de conversions, d’adhésions, de campus multi-sites, de téléchargements de sermons et de ventes de livres. Il semble difficile de se concentrer à la fois sur les chiffres et sur les personnes. Le pasteur principal de Mars Hill, Mark Driscoll, aurait affirmé et insisté sur ce fait: « Je ne peux pas apprendre de John Piper ou me soumettre à lui parce que mon église est plus grande que la sienne ». C’est l’un des moments les plus déconcertants de l’histoire pour moi. Et pourtant, aujourd’hui encore, même ici en Australie, nous persistons à évaluer les ministères et les leaders sur la base de la taille de leur église. C’est une chose très dangereuse parce que le pragmatisme fondé sur des principes peut très facilement céder la place à un pragmatisme brutal. Les gens peuvent devenir un moyen de parvenir à une fin. Et nous pouvons être incités à excuser les faiblesses de ceux qui semblent favoriser la croissance de l’église.
Avoir un don n’excuse rien
Être doté d’un don n’excuse pas le manque de piété. Je ne suis pas sûr que nous l’ayons encore compris. Si la situation à Mars Hill a mis tant de temps à émerger, c’est parce que Mark Driscoll (et d’autres) était remarquablement doué dans de nombreux domaines. Ses « excentricités » ont été excusées non seulement parce que son église connaissait une grande expansion, mais aussi parce qu’il faisait lui-même toutes sortes de choses tout à fait stimulantes. Le problème, c’est qu’il agissait également au détriment de beaucoup d’autres. Nous devons faire preuve de courage et de rigueur pour ne pas céder à la tentation d’excuser les fautes morales de responsables ministériels aux compétences exceptionnelles.
Ne pas supposer que tous les jeunes leaders sont enseignables
J’ai été personnellement frappé par un commentaire de Colin Hansen sur l’implication de Mark Driscoll dans la Gospel Coalition à ses débuts aux États-Unis. Hansen a souligné qu’il n’était venu à l’esprit de personne que Driscoll ne réalisait pas qu’il avait tant à apprendre des Keller, Carson, Piper et autres. Il semble que tout le monde ait supposé qu’en tant que jeune leader, il souhaitait apprendre de ceux qui l’avaient précédé. Driscoll lui-même a réussi à se montrer suffisamment « humble » pour se retrouver dans le cercle des personnes les plus influentes. Le fait que la plupart de ces dirigeants ne l’aient jamais vraiment vu à l’œuvre dans son propre environnement a aussi joué en sa faveur. Mais que devons-nous faire de tout cela? La formation devrait être un des principaux critères pour toute personne entrant dans le ministère ou le leadership de l’Église. Nous devrions la rechercher, la scruter, et non pas simplement la supposer.
Attention à la manipulation
Au fur et à mesure que l’histoire se poursuit, le balado démontre de plus en plus que Driscoll est passé maître dans l’art de la manipulation. En particulier, il n’hésitait pas à dire que Dieu lui avait dit de faire ceci ou cela. On m’a rappelé fermement les dommages que ce type de comportement peut causer, et ça été pour moi l’occasion de m’arrêter et de réfléchir. Nous n’utilisons peut-être pas le même genre de langage que Driscoll, mais il n’est que trop facile de conduire des frères et sœurs plus jeunes dans les directions que nous souhaitons qu’ils prennent en faisant appel à la « sagesse spirituelle » (presque toujours la nôtre!), ou en leur disant qu’ils sont des hommes « dignes d’être vus » ou des femmes qui sont clairement « douées pour le ministère pastoral ». Nous devons faire attention.
Assurer une redevabilité
Le refus apparent de Mark Driscoll de se soumettre à qui que ce soit pendant ses années à Mars Hill est stupéfiant. Qu’il s’agisse des tentatives incessantes de centralisation du pouvoir, du traitement cruel de toute personne dont la loyauté pourrait être mise en doute ou de la glorification du nombre de personnes qui ont été expulsées ou écrasées, c’est l’histoire d’un esprit indépendant qui est devenu sauvage. Quel que soit notre système de gouvernance, nous devons faire de notre mieux pour éviter que cela ne se produise. Pour ceux d’entre nous qui appartenons à des dénominations du type confessionnel, nous devons nous assurer que nous sommes vraiment presbytériens ou anglicans. Pour ceux qui sont indépendants, nous devons nous assurer que nos constitutions sont en adéquation avec celles-ci et qu’elles ne permettent pas à des individus de s’emparer du pouvoir et d’en abuser. Il est essentiel d’intégrer dans nos structures et nos règlements, bien en amont, la capacité à gérer les conflits et les abus de pouvoir (en particulier de la part du dirigeant principal).
Se rappeler que la masculinité toxique existe – et qu’elle doit être éliminée!
Parfois, je pense que nous oublions qu’il y a souvent une bonne raison pour que les égalitaristes mettent au pilori les complémentaristes et comparent leur vision des rôles de l’homme et de la femme à de l’abus. C’est parce que les évangéliques réformés n’ont pas un très bon palmarès dans ce domaine. L’écoute du balado me l’a rappelé à maintes reprises. Les propos de Driscoll sur les hommes et les femmes, le sexe et le mariage n’ont pas bien vieilli. À l’époque, cela pouvait sembler franc, pertinent, audacieux et courageux, mais aujourd’hui, c’est affreux. Inexcusable. Abusif. Mais ce dont nous devons nous souvenir, c’est que Driscoll s’adressait à notre « communauté » (et en faisait partie). Nous l’avons écouté, nous lui avons donné une tribune. Nous devons l’admettre, nous repentir si nécessaire et nous assurer que nous ne répéterons jamais ses horribles erreurs, mais que nous vivrons un complémentarisme généreux, positif, aimant et respectueux, épuré de tout esprit chauvin.
Rechercher l’humilité par-dessus tout
Pour moi, la leçon la plus importante est simple. Nous devons nous préserver de l’orgueil et rechercher l’humilité par-dessus tout. L’histoire de Mars Hill, me semble-t-il, est une histoire d’orgueil généralisé. Le problème est que nous pouvons tous créer un environnement où la vanité semble raisonnable, où l’orgueil semble correspondre à un leadership visionnaire, où l’impitoyabilité est exigée par les priorités de l’Évangile. Nous ne devons pas emprunter cette voie. Quelqu’un m’a parlé cette semaine d’un autre dirigeant fautif qui avait la réputation de ne jamais s’excuser auprès de qui que ce soit, pour quoi que ce soit. Cela non plus ne devrait pas se produire.
Alors que je terminais le balado, je me suis rappelé très clairement les paroles de Jacques, qui saisissent magnifiquement le cœur de ce que nous devons certainement apprendre des tristes événements qui se sont déroulés en 2014 à l’église Mars Hill :
Adultères que vous êtes! ne savez-vous pas que l’amour du monde est inimitié contre Dieu? Celui donc qui veut être ami du monde se rend ennemi de Dieu. Croyez-vous que l’Écriture parle en vain? C’est avec jalousie que Dieu chérit l’Esprit qu’il a fait habiter en nous. Il accorde, au contraire, une grâce plus excellente, c’est pourquoi l’Écriture dit: Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humble. Soumettez-vous donc à Dieu; résistez au diable, et il fuira loin de vous. Approchez-vous de Dieu, et il s’approchera de vous. Nettoyez vos mains, pécheurs; purifiez vos cœurs, hommes irrésolus. Sentez votre misère; soyez dans le deuil et dans les larmes; que votre rire se change en deuil, et votre joie en tristesse. Humiliez-vous devant le Seigneur, et il vous élèvera. (Jacques 4.4-10)